Sororité : mettre la solidarité féminine au premier plan cette année.

A peine l’année 2021 débute que les droits des femmes, les violences basées sur le genre et le féminisme sont au centre des discussions. Nous entamons une nouvelle décennie, et le monde commence à peine à se remettre d’une crise sanitaire mondiale sans précédente. Inutile de préciser que le monde a changé et les habitudes ébranlées.

Et voici, l’occasion pour les femmes de jouir pleinement de leurs droits, de changer le regard que les sociétés ont de la féminité. Mais plus important encore, c’est l’occasion d’être solidaires les unes envers les autres. Nous sommes dans des sociétés qui manquent cruellement de solidarité féminine, et il est temps de changer cet état des choses. La sororité doit être au centre de toutes les activités entreprises par les femmes et pour les femmes cette année.

Qu’est-ce que la sororité ?

La sororité est un mot qu’on n’entend pas souvent mais qui existe bel et bien dont le besoin se fait ressentir de jour en jour autour de nous. Au stricto sensu la sororité est la solidarité féminine. Et au lento sensu la sororité est le soutien et l’entraide entre les femmes, elle implique la formation d’un seul groupe féminin, une entité diversifiée qui lutte contre les discriminations, les oppressions et les inégalités. Son objectif, briser le patriarcat.

La solidarité féminine est-elle un mythe ?*

 
Au cours de l’histoire les femmes ont fait preuve de solidarité les unes envers les autres à un moment donné. En exemple, nous pouvons citer l’évènement ‘’Aba women’s war ou women’s war’’ en français « la guerre des femmes ». Un évènement qui s’est déroulé au Nigeria à l’époque coloniale où environ 10.000 nigérianes ont protesté contre les administrations coloniales britanniques, qui voulaient imposer des taxes exorbitantes aux commerçantes. Les femmes particulièrement les africaines se sont donc soutenues à un moment crucial de leur histoire. Et le cas « Aba’s women’s war » m’a particulièrement touché par son impact et la force de caractère des femmes qui ont menées cette bataille. Ces femmes africaines n’avaient rien à envier aux suffragettes anglaises qui se sont toutes aussi battues pour le droit au vote (un autre exemple de sororité).

Les luttes féministes s’organisent en ligne

De nos jours cette solidarité féminine s’exprime également sur les réseaux sociaux, le digital gagnant de plus en plus d’espace. Pendant les périodes #Metoo, #Vraiefemmeafricaine, #Balancetonport ou encore moins célèbres les #chatnoir, #forçasistas ; nous avons appris une leçon cruciale : nous avons vu que la solidarité féminine est une force.
Le nombre important de femmes qui se sont jointes au mouvement, qui ont manifesté leur soutien, leur sympathie et leur compréhension a permis de leur donner du courage. Donner aux femmes une chance de faire part de leurs expériences douloureuses et finalement de trouver un soulagement qui a servi de thérapie collective, gratuite et ouverte à toutes.

Les femmes doivent s’organiser en communauté

Même si les quelques exemples cités ci-dessus nous démontrent l’existence de cette solidarité féminine, il est malheureux de souligner l’inexistence d’une communauté féminine mondiale. Tous les groupes opprimés dans le monde constituent une communauté, la communauté noire, les juifs ou même le prolétariat. Dans ces cas il y’ a eu pour les opprimés un avant : ils ont en commun un passé, une tradition, parfois une religion et une culture. Et c’est un évènement historique qui a établi ces états de choses, un développement historique. Les femmes contrairement à ces opprimé.es ne constituent pas une minorité. Il y’a toujours eu autant de femmes que d’hommes. Par exemple selon l’écrivaine féministe Simone de Beauvoir, l’auteure du livre « le deuxième sexe : « Les prolétaires disent « nous ». Les Noirs aussi. Se posant comme sujets ils changent en « autres » les bourgeois, les Blancs. Les femmes – sauf en certains congrès qui restent des manifestations abstraites – ne disent pas « nous » ; les hommes disent « les femmes » et elles reprennent ces mots pour se désigner elles-mêmes ; mais elles ne se posent pas authentiquement comme Sujet. »

Qu’est ce qui explique donc cette situation d’absence de solidarité chez les femmes ? Toujours selon, Simone de Beauvoir : « l’action des femmes n’a jamais été qu’une agitation symbolique ; elles n’ont gagné que ce que les hommes ont bien voulu leur concéder ; elles n’ont rien pris : elles ont reçu. C’est qu’elles n’ont pas les moyens concrets de se rassembler en une unité qui se poserait en s’opposant. Elles n’ont pas de passé, d’histoire, de religion qui leur soit propre ; et elles n’ont pas comme les prolétaires une solidarité de travail et d’intérêts. Elles vivent dispersées parmi les hommes, rattachées par l’habitat, le travail, les intérêts économiques, la condition sociale à certains hommes – père ou mari – plus étroitement qu’aux autres femmes. Bourgeoises, elles sont solidaires des bourgeois et non des femmes prolétaires ; blanches, des hommes blancs et non des femmes noires. »
Le patriarcat y est donc pour beaucoup. Empêcher les femmes de former un seul groupe, une entité diversifiée est un moyen de maintenir les normes établies par ce dernier. Et vu que les femmes se complaisent dans le rôle de l’autre, il reste difficile pour elles de se libérer. Et comment voir aux autres femmes des alliées si les liens qui les unissent à leurs condisciples masculins sont plus forts (père, mari, patron…).
« Refuser d’être l’autre, refuser la complicité de l’homme, ce serait pour elles renoncer à tous les avantages que l’alliance avec la caste supérieure peut leur conférer ». Simone Beauvoir. De ce fait elles restent l’autre qui complète l’un « les uns et les autres ».
Le premier pas pour atteindre une réelle solidarité féminine, ça serait de se constituer en communauté. Nous sommes toutes dans le même bateau, et nous avons intérêt à ce que le bateau arrive à bon port.

Nappy.co

Nous devons renforcer la solidarité féminine

Chacune à son niveau doit/peut faire quelque chose à commencer par :
Arrêter de rabaisser les autres femmes (ne pas juger ou méduser d’autres femmes surtout en présence des hommes). Soutenir les femmes de sa famille, de son travail et de son environnement. Soutenir l’ambition des autres femmes en appuyant la candidature d’une collègue à un concours, en partageant son expérience avec d’autres femmes. Célébrer la réussite de chacune. Et il est primordial que nous voyions aux autres femmes des alliées.