Les figures fortes dans l’histoire de l’Afrique : Yaa Asantewaa du Ghana !

Beaucoup d’Africaines d’origines et de conditions diverses se sont investies dans des actes de résistance et des luttes émancipatrices, mais leurs noms figurent trop rarement dans les livres d’histoire. Trop souvent négligées par les chercheurs, absentes à des exceptions dans les documents, leurs sacrifices et leurs efforts sont tombés dans l’oubli.

La reine mère Yaa Asantewaa (1840-1921) à son statut de sœur et mère de chef conférait une place éminente dans la société ashanti.

 

« Guerre du Tabouret d’or »

Lorsqu’en 1896 les Britanniques annexèrent cette puissante confédération qu’ils rebaptisèrent Gold Coast (aujourd’hui Ghana4), ils en exilèrent les rois et chefs jugés trop nationalistes, dont le roi Nana Prempeh 1er, pour empêcher toute déstabilisation du pouvoir colonial. Mais en mars 1900 à Koumassi, capitale de l’ancien royaume, le gouverneur britannique Frederick Hodgson exigea qu’on lui remette le fameux tabouret d’or de l’empereur Ossei Tutu, fondateur de la confédération ashanti au 17e siècle. Il prétendait s’asseoir sur cette précieuse relique qui symbolisait la royauté traditionnelle pour montrer que le pouvoir était désormais aux mains des Européens. Il pensait envoyer ensuite le tabouret à Londres en cadeau à la reine Victoria. Une telle demande était sacrilège pour Yaa Asantewaa, alors gardienne du trésor royal et dirigeante du district d’Ejisu (Edweso), en territoire ashanti.

Considérant cette prétention comme une insulte à leur histoire et culture, la reine mère s’en prit vivement aux notables et chefs de clans qui tergiversaient lors du Conseil des sages chargé de statuer sur cette question. Certains préconisaient le recours au dialogue pour faire renoncer le gouverneur. Il faut rappeler que l’Ashanti avait connu de dures répressions après les divers soulèvements populaires en 1824, 1826, 1874 et 1896. Or, pour Yaa Asantewaa, la seule réponse à apporter à l’insolent gouverneur était la guerre contre ces Anglais qui avaient placé leur terre sous protectorat, s’étaient emparés des mines d’or de l’Ashanti, et surchargeaient les populations d’impôts. Dans un discours resté célèbre, elle apostropha l’assemblée des notables : « Aucun homme blanc n’aurait osé parler à un chef de l’Ashanti de la manière dont le gouverneur nous a parlé ce matin. La fierté et la bravoure de l’Ashanti n’existeraient-elles donc plus pour vous ? C’est incroyable ! Alors je vous le dis, si vous, les hommes de l’Ashanti, vous n’avez pas le courage de les affronter, alors nous allons le faire ! Oui, nous, les femmes, allons le faire ! J’appellerai mes semblables et nous combattrons les Blancs. Nous nous battrons jusqu’à ce que la dernière d’entre nous tombe sur le champ de bataille ! » Honteux, les chefs s’inclinèrent.

Une guerrière hors paire

Décidée à chasser les Anglais pour faire revenir d’exil le roi Prempeh 1er, la reine mère lança un appel à la suite duquel des milliers de volontaires vinrent s’enrôler sous son commandement. Elle leur fit préparer en secret un entraînement physique et spirituel et organisa ses combattants en escadrons qui se dissimulèrent dans les faubourgs de Koumassi. Elle envoyait ses ordres aux chefs de bataillons par un réseau de messagers indétectables dans la population, et le 28 mars 1900, la vigoureuse quinquagénaire, fusil en bandoulière, donna le signal de l’insurrection. Ils lancèrent une attaque sur le fortin qui abritait les représentants britanniques, dont le gouverneur, des fonctionnaires et une protection armée de cinq cents supplétifs originaires du Nigeria.

Le siège dura huit mois durant lesquels les assaillants harcelèrent leurs cibles par des attaques sporadiques, sans fléchir devant les nombreuses pertes infligées par les canons et fusils anglais. Yaa Asantewaa fit ensuite bloquer les approvisionnements en eau et en nourriture du fort, d’où des gens tentèrent de s’échapper sous le feu des balles ashantis, plutôt que de mourir de faim. Comme on ne pouvait soigner les blessés ni enterrer les morts à l’intérieur du fort, les cadavres furent balancés par-dessus les palissades.

Des assiégés moururent de la variole et de la fièvre jaune. Yaa Asantewaa décida alors d’autoriser les femmes – épouses de colons et employées africaines- à quitter cet enfer. Mobilisant ses troupes indigènes stationnées au Nigeria et en Sierra Leone, Londres dépêcha de gros renforts pour contrecarrer les Ashantis soutenus par de nouveaux combattants de provinces alliées. Le 11 juillet 1900, les forces anglaises investirent Koumassi et après une violente bataille, libérèrent le gouverneur et quelques blessés qui furent transportés par bateau et évacués par voie fluviale jusqu’à Accra.

Commença ensuite la chasse aux résistants. Les principaux meneurs furent progressivement arrêtés, sauf Yaa Asantewaa, restée introuvable. En janvier 1901, apprenant l’arrestation de sa fille, la reine mère alla se rendre aux Anglais. Déportée aux Seychelles, elle y mourut en octobre 1921 après vingt ans d’exil. Cet épisode est resté dans les mémoires sous le nom de « Guerre du Tabouret d’or ».

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